Jour 10 du reconfinement ou comment trouver la sérénité entre résignation et défiance…

Bilan mitigé de cette semaine passée … En consultation, des hommes et femmes ordinaires qui déploient différentes stratégies de faire face pour lutter contre l’anxiété, la morosité… la dépression parfois amène à ressasser les blessures d’autrefois, réactivées par le vécu de solitude, d’abandon, de perte… Nous sommes tous des funambules, artistes de la vie cherchant avec plus ou moins de facilité notre équilibre. Pour les plus vulnérables, l’idéation suicidaire guette, mais la plupart des personnes que j'ai rencontrées (attention, je ne reçois qu'une petite partie de la population, mon billet d'humeur n'est pas destiné à donner des conclusions mais à nous interroger), arrivent à s’adapter encore et encore... pour remplir leurs responsabilités et trouver des astuces pour aménager leur emploi du temps quand ce n’est pas pour sauver son emploi ou en retrouver un... Mes pensées chaleureuses vont vers les commerçants qui ont dû fermer...

Heureusement quelques-uns d'entre nous, résilients, auront perçu une beauté cachée nichée dans d’autres épreuves personnelles qu’ils auront surmontées, gagnant un sentiment de fortitude, de courage et générosité, leur permettant de mobiliser leurs ressources, et d’aborder ce reconfinement avec sérénité.

Beaucoup d’appels de parents d’enfants et d’ados en stress, en refus scolaire anxieux, de 5 ans à 16 ans pour ma part… Incompréhension et peur de ce nouveau confinement qui semble bouffer l’énergie des adultes, parents et enseignants, résignés souvent comme dans une défaite molle… Difficulté à supporter le contact du masque sur une peau hypersensible pour les plus de 6 ans même s’ils comprennent son utilité, surtout quand on est déjà privé de foot, de danse et de fête d’anniversaire avec les amis… voire des attaques de panique déclenchée par le non sens, comme l’interdiction de ne plus parler à la cantine au lycée (oui oui, voilà bien une des pires mesures sanitaires pour la jeunesse que de l’interdire de communiquer !) sur un temps de pause réduit à une peau de chagrin !

Sentiment de solitude, de perte du lien affectif chez les enfants qui ont besoin de ressentir l’autre au travers ses mimiques… Projection sur le collège, le lycée du refus de grandir dans un monde devenu si hostile pour des parents terrassés par cette nouvelle crise sanitaire et son lot de frustrations… Mais quand les adultes arrivent à tenir bon, à conserver force et courage, il est possible pour les jeunes de se projeter dans un métier, et donner sens à son parcours étudiant, et rêver sa vie future…

Quel a été l’essentiel du travail ces derniers jours ? :

• la verbalisation du manque, de la colère, tristesse, chagrin,… tapis derrière un masque honorable, blotti au creux des douleurs musculaires ou tentant de s’exprimer par la douleur gastrite pour les adultes, le pipi au lit ou l’agressivité soudaine sur la petite sœur pour les plus petits, par ex…

• le besoin de fuite du réel trop pesant, du moins un temps, pour apaiser le corps, le laisser vivre d’autres émotions agréables et dénouer les tensions… Art thérapie, méditation en pleine conscience, ou jeux des valeurs pour se centrer sur soi et consolider sa citadelle intérieure…

• l’émergence d’un compromis, ou comment faire la différence entre ce qui ne peut être changé et doit donc être accepté, de ce que nous pouvons faire évoluer, ensemble, pour créer, offrir, de meilleures conditions de vie à nos enfants, à nous-mêmes…

Ce qui est revenu finalement quasiment à chaque séance, quel que soit le consultant, adulte, enfant ? C’est une question : comment libérer son imaginaire de la tyrannie de la culpabilité, apaiser son mental des « il faut, ou je ne dois pas »… et oser le petit grain de folie dans son quotidien, dans son foyer, le soir, le week-end, pour supporter l’austérité, tels des sportifs se préparant à un trail, une sacré épreuve physique et mentale de longue distance… qui n’est pas forcément un chemin de croix tout dépend comment on regarde le chemin.

Ce que je retiens, ce qui semblerait être une piste chez ceux qui vivent assez bien cette période : Ne pas banaliser ses inquiétudes, au contraire déjouer les pièges tendus par nos peurs, en laissant s’exprimer notre audace, faire un pas de côté pour trouver un monde où il fait mieux vivre, du moins quelques heures…, hors de la route toute tracée par notre gouvernement, balisée de restrictions pour certaines farfelues et incohérentes.

Espérons que ces bulles de bien-être nous amèneront à prolonger après le confinement, cette façon de vivre plus authentique, proche de nos besoins essentiels… Besoins singuliers qui ne sauraient faire partie d’une quelconque liste et être jugés par quiconque comme futiles ou prioritaires…

Toutefois, si l’espoir fait vivre et permet de patienter, ne rien faire ni anticiper relève de la pensée magique et n’assure en rien des lendemains meilleurs… l’espoir seul, l’attente, finit par procurer à nouveau de l’anxiété… Alors, et vous ? Sans tomber dans une frénésie d'actions, quel petit grain de folie pensez-vous vous octroyer pour vivre cette période avec force et courage, pour faire face à vos responsabilités dans votre travail et auprès de vos proches ? Quels sont vos rêves, mais aussi quelles activités avez-vous envie de tester, seule ou avec votre famille ? Quels sont les petits défis ou grands objectifs, pourquoi pas, que vous pensez réaliser pendant le confinement pour continuer à nourrir votre âme, entretenir vos relations de couple, amicales, avec vos enfants, et préparer demain activement ?

Pour aller plus loin, voici le lien vers la chronique de François Busnel sur le pas de côté :

https://www.lexpress.fr/culture/livre/le-pas-de-cote-de-michel-serres_1687872.html

Et quelques uns de mes articles en liens avec ce billet d'humeur, vous y trouverez d'autres éléments bibliographiques :

http://patricia.delattre-psychologue.over-blog.fr/2019/09/vers-une-temperance-efficace-par-dela-les-menaces-d-effondrement.html

http://patricia.delattre-psychologue.over-blog.fr/2018/06/guide-pratique-du-lacher-prise.html

http://patricia.delattre-psychologue.over-blog.fr/2017/05/le-sentiment-d-exister-un-travail-de-funambule-d-artiste.html

http://patricia.delattre-psychologue.over-blog.fr/2016/04/accepter-le-manque.html

http://patricia.delattre-psychologue.over-blog.fr/2015/09/comment-aider-un-proche-a-faire-face-a-un-traumatisme-psychique-un-choc-emotionnel-a-la-suite-d-un-evenement-de-vie.html